i don't know who we are but i know what i feel, just listen
"Il n'y avait certainement rien à comprendre. Toute la vie n'était finalement qu'une succession de sentiments indescriptibles, que les hommes tentaient, tant bien que mal, de définir en utilisant des mots stupides qui ne signifiaient rien de plus qu'un balbutiement incompréhensible pour nos coeurs. Le mot "aimer" par exemple, en français il n'existe qu'un seul mot pour exprimer que l'on aime le chocolat, ou que l'on aime quelqu'un. Alors si l'on suivait le raisonnement des hommes, ce sentiment serait exactement le même dans les deux cas, on ne peut pas aimer une personne plus qu'un carré de chocolat, voilà donc à quoi se résume ce que certains qualifient de notre particularité, à nous les humains, de savoir aimer. Tandis que dans d'autres langues, d'autres peuples, il existe plus d'une trentaine de mots pour exprimer cela. Une trentaine de mots de plus à mémoriser, mais pourquoi? Pourquoi devoir toujours donner un sens à tout? et pourquoi ne pas se contenter de garder ses émotions? pourquoi les dire tout en sachant que la personne qui les entendra ne pourra jamais les ressentir de la même façon que vous? pourquoi ne pas admettre que le silence dit souvent bien plus que tout ce que nous sommes capables de prononcer? Voilà où elle en était de son raisonnement, elle tournait en rond, tout en sachant qu'elle finirait par être prise à son propre piège. Elle détestait s'acharner sur son sort, plus de crainte qu'on ne la rejette qu'autre chose, parce qu'elle savait que c'était sa façon d'avancer et de rechercher la lumière. La lumière... elle ouvrit ses volets. Six heures du matin, le soleil se levait. Elle était dans ce même état de somnolence que lors du réveil, après un rêve, quand on ne sait plus où l'on est, que pour quelques secondes, notre mémoire ne fonctionne plus, lorsqu'on oublie tout ce qui a pu se passer avant, et soudain la réalité vous rattrape et il arrive parfois que l'on veuille à tout prix se rendormir et l'oublier encore une fois. Elle était dans ce même état d'incertitude, lorsque toutes les issues sont bloquées, que la seule chose que l'on puisse faire est d'attendre sans en avoir le temps, exactement comme lorsqu'on veut sortir d'une eau glacée, un soir d'été, mais que la brise du soir nous incite à y rester, les lèvre violettes. Alors nos membres se fragilisent et se mettent à trembler, notre regard continue de fixer la serviette qui nous attend dehors, sans que l'esprit ne parvienne à convaincre le corps de s'exposer au vent glacé pour aller chercher le doux réconfort qui nous attend, dur combat dont on connait déjà la fin. Il n'y avait strictement rien à faire, à part regarder l'horizon, en espérant que ce qui se profilerait derrière ne pourrait pas être pire que ce qui avait déjà eu lieu. Elle n'avait rien à faire pour une fois. Si seulement elle l'avait su."